Le mardi 5 février 2013, les députés britanniques ont voté un projet de loi autorisant le mariage homosexuel. Le texte peut diviser au sein des députés du parti conservateur mais le dialogue semble beaucoup moins houleux outre-manche que dans notre mère patrie. Les citoyens britanniques quant à eux n ‘ont jamais battu le pavé pour dire non à cette loi. « En Angleterre, le mariage gay est la dernière petite avancée sur le chemin vers les droits des homosexuels, alors qu’en France, on essaie de passer directement au mariage », constate Jon Henley, journaliste au quotidien anglais The Guardian et ancien correspondant à Paris pendant neuf ans. « Ce qui me frappe en France, c’est le ton du débat et la violence (verbale) qu’on n’a pas vus en Angleterre », ajoute-t-il. Au Royaume-Uni, le projet de loi des conservateurs est soutenu par de nombreux travaillistes et des libéraux-démocrates. David Cameron, leader du parti conservateur, déclare être « un grand adepte du mariage. Il aide les gens à s’engager mutuellement et je pense que c’est la raison pour laquelle les homosexuels devraient pouvoir se marier aussi (…) C’est un bon pas en avant pour notre pays et je suis fier que notre gouvernement l’entreprenne ». Soutenu par l’opinion publique, par sa majorité, par une grande partie de l’opposition, et par les médias, à l ‘exception du quotidien conservateur Sunday Telegraph qui craint d’important dégâts sur le parti à l’approche des élections de 2015, le gouvernement britannique a vu ce projet de loi être adopté dans un climat favorable.
Pourquoi une telle différence de traitement pour un même sujet ?
Les couples homosexuels britanniques ont les mêmes droits civils que les hétérosexuels depuis 2005 grâce au « Equality Act ». Le pays à d’ores et déjà une longueur d’avance sur ce sujet. Les couples du même sexe ont, depuis 2010, le droit à l’adoption et également à la procréation médicalement assistée, la fameuse PMA qui fait fait débat dans notre pays. La France quant à elle, pendant ce temps, s’est contenté de la mise en place du Pacte civil de solidarité (Pacs) en 1999. « La différence dans la tonalité des débats vient sans doute du fait qu’en Grande-Bretagne, les couples homosexuels bénéficient déjà quasiment des mêmes droits que les couples hétérosexuels. La loi française va devoir, elle, faire un pas de plus, nous, nous sommes déjà passés par là », avance Fabian Hamilton, député travailliste de Leeds (Nord de l’Angleterre). Ce dernier s’interroge cependant sur l’opportunité d’un tel projet de loi. « Pourquoi un gouvernement conservateur le porte-t-il ? Pourquoi maintenant ? Était-ce vraiment nécessaire ? » et je rajouterai, pourquoi tous les pays s’y mettent ? Est ce une problématique globale et mondiale ? Pour les églises évangélistes, ces mariages homosexuels sont « le signe avant coureur que le ciel va s’effondrer et de la fin de l’humanité ».
L’influence de l’église en France est bien plus importante qu’au Royaume Uni
Au Royaume-Uni, l’église exerce beaucoup moins d’influence sur la vie, la société, la culture britannique que l’église catholique en France. Cependant, cela ne signifie pas que tout se passe sans heurts.
L’Église d’Angleterre et celle de l’aile traditionnelle du parti de David Cameron, sont des entités susceptibles de mettre en danger l’avenir politique du premier ministre. Les discours et les annonces de l’Église d’Angleterre et des catholiques n’ont pas tout du influencé l’opinion publique car on peut voir que 55% des Britanniques soutiennent le mariage homosexuel, alors que 36% se disent contre, selon un sondage publié en décembre dernier par YouGov. « L’Église catholique en France a plus d’influence sur les esprits », explique Henley, « il y a pas mal de Français qui pensent que la France reste quand même un pays catholique ».
Le texte de loi voté en Angleterre est bien plus symbolique qu’en France. Contrairement à la proposition du texte de loi française – mariage pour tous -, il n’y aura pas d’évolution des droits parentaux des homosexuels. En Angleterre, les couples homosexuels ont dores et déjà la possibilité d’adopter des enfants depuis 2002, ils peuvent également s’engager via un contrat d’union civile depuis 2005, et la gestation pour autrui est légale à condition qu’elle soit non-rémunérée. Le chemin à faire côté français est plus long, mais le mouvement est lancé, la démarche s’est internationalisée. Les Français font figure de « résistants » pour tous ceux qui pensent cette évolution comme négation de l’humain, et figure de « retardataire » pour leurs adversaires.
Kenny Fourchaud