« La surprise Hollande » titrait au lendemain de son élection le Neue Zürcher Zeitung. A plusieurs reprises, le candidat socialiste apparaît comme l’homme « qu’on sous-estimait », dont l’élection était inattendue. Au delà de la surprise, la victoire de François Hollande suscite un certain scepticisme Outre-Rhin. Les allemands s’interrogent sur l’avenir des relations franco-allemandes et la capacité du nouveau président à se montrer à la hauteur des espoirs nourris par ses électeurs.
« François Hollande ne va pas mener de Révolution » pouvait-on lire dans le Frankfurter Rundschau, au lendemain de sa victoire. Dans le Spiegel, c’est l’absence de marge de manœuvre suffisante liée à la crise qui est pointée du doigt, condamnant le nouveau président « à décevoir immanquablement la France ». Si le ton est plutôt pessimiste dans la presse allemande, la victoire de François Hollande inquiète également dans les rangs de la CDU.
En effet, le contentieux sur la politique budgétaire est le principal point de désaccord entre les dirigeants français et allemand. Attaché à la relance de la croissance, François Hollande s’est engagé au cours de la campagne présidentielle à renégocier le pacte budgétaire européen, ce à quoi la chancelière s’oppose fermement. A ce titre, elle est soutenue par le président de la banque centrale allemande Jens Weidmann, considérant qu’il faut refuser de « détricoter » ce pacte.
Pour autant, François Hollande pourrait-il faire fléchir la chancelière sur la politique budgétaire ?
Les résultats de la CDU aux élections régionales de Rhénanie du Nord ont été décevants, le parti ayant réalisé son plus mauvais score jamais enregistré. Pour Angela Merkel, la défaite de Nicolas Sarkozy suivie du revers de son parti au niveau régional, résonnent comme un désaveu du « tout-austérité ».
Toutefois de nombreux sondages démontrent que la popularité de la chancelière se maintient au niveau national, malgré les mauvais résultats obtenus en Rhénanie. En outre, Angela Merkel ne pourrait réellement se positionner en faveur d’une politique de relance sans craindre de perdre son électorat conservateur, allergique à cette idée.
La coopération entre la France et l’Allemagne demeure cependant une impérative nécessité. Selon Jacques-Pierre Gougeon, directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), et auteur en 2012 de « France-Allemagne: une union menacée? », la relation franco-allemande est structurelle et transpartisane. Elle a déjà associé par le passé des dirigeants de différents bords sans avoir été mise en péril. Selon lui, des points d’entente pourraient exister : François Hollande, considéré comme rationnel, correspondrait à l’attachement de son homologue allemande à la « Berechenbarkeit », à savoir la «fiabilité ».
La chancelière affirme par ailleurs qu’un partenariat stable avec le nouveau président français est possible. Dans un document récemment diffusé par la chancellerie, elle revient sur la nécessité d’une entente solide entre les deux pays : « Nous savons qu’une bonne relation franco-allemande est tout simplement très importante, pour les deux pays ». « Nous avons des approches différentes pour parvenir à la croissance, mais nous allons partager nos idées pour voir quelles sont les différentes pistes pour stimuler la croissance», souligne-t-elle.
Conformément à la tradition, la première visite du chef de l’Etat a été consacrée à son voisin allemand, le 15 mai dernier. Ce premier rendez-vous symbolique fut l’occasion d’une première prise de contact entre François Hollande et Angela Merkel. Résolus à continuer de faire du couple franco-allemand le moteur de l’Union européenne, le chef de l’Etat français et la chancelière se sont notamment accordés sur la situation de la Grèce et son maintien dans la zone euro.
Anne-Sophie Passet, étudiante erasmus à Berlin