Le 20 janvier 2015, Pina Lalli, professeure à l’Université de Bologne, est intervenue dans le cadre du cours Communication gouvernementale comparée. Son intervention a porté dans un premier temps sur les acteurs et les moyens de communication dans les systèmes de santé publique, et dans un deuxième temps sur l’open data et ses conséquences.
La communication au sein des systèmes de santé publique
Le système de santé est national en Italie, mais il a la particularité d’être régi par les régions, dans lesquelles s’organisent des services publics territoriaux sous la dénomination d’entreprises de santé locale, chacun avec un directeur général nommé par la Région. En principe, la loi italienne, en matière de communication publique, précise que tous les établissements publics possèdent un service de communication comprenant un bureau de relations publiques, avec un directeur diplômé de communication, et un bureau de presse avec un directeur possédant la carte de journaliste. Cette même loi propose une troisième figure: le porte-parole, qui serait une personne répondant directement à la direction du service voire à l’élu dans le cas d’institutions politiques, et dont on ne précise pas la nature de la formation. Cependant, concernant les services de santé territoriaux il est très rare de trouver cette même organisation de la fonction de communication publique. En effet, il est plus fréquent de trouver un journaliste responsable du bureau de presse, en général nommé par le directeur ; un responsable d’un bureau de relations publiques, et un service de communication voire de promotion de la santé s’occupant principalement des campagnes.
La communication réalisée autour du domaine de la santé publique produit principalement des messages permettant la distinction entre ce qui est sain ou non pour la santé. Selon Pina Lalli, cette vision se révèle simplifiée et normative car la vérité ne dépend pas de la légitimité de la connaissance médicale. Il faudrait d’autre part davantage affiner le ciblage des individus, pendant la réalisation des campagnes publicitaires de santé publique.
Par exemple, la dernière publicité préventive sur l’alcool est relative à la sécurité routière, ce qui introduit une certaine ambivalence : l’alcool serait réellement dangereux seulement lors de la prise du volant. Ainsi, ces campagnes de communication visent à faire changer les comportements des citoyens, et se fondent sur des attitudes normatives. Or, tous les individus ne se comportent pas de la même façon, et n’ont pas la même culture ni la même existence personnelle.
« Société de l’information et de la communication » : de nouveaux types de citoyens ? De nouvelles différences ?
Pina Lalli s’est interrogée sur les questions relatives aux changements des comportements des citoyens liés à la communication. En effet, notre société dite « de communication » bouleverserait les pratiques des communicants envers les citoyens, et celles des citoyens envers les sources d’informations dorénavant multipliées.
Aujourd’hui, de nouvelles techniques de communication s’installent au sein du marketing, qui s’intéresse particulièrement au changement du consommateur, le plaçant au centre de la stratégie. Ainsi, le marketing s’attache à accroître son attention à l’égard des tendances culturelles et des valeurs des groupes sociaux dans une perspective de meilleur ciblage du consommateur.
Par ailleurs, le citoyen adopterait un nouveau comportement à l’égard de la nouvelle multiplication d’information. Il serait davantage critique, mais serait parfois en difficulté pour trouver la meilleure source d’information face à cette fragmentation.
La fragmentation des sources d’informations et l’ouverture des données est un réel enjeu qui permet le contrôle croisé de l’authenticité d’une information par la reconnaissance des internautes. Pina Lalli pointe qu’il y a donc de nouveaux citoyens, mais aussi de nouvelles élites, qui ne sont pas forcément des journalistes ni des professionnels. Cette collectivité de nouveaux citoyens participe par exemple à la croissance de Linux, ou encore de Wikipédia. Ainsi, il n’y aurait plus deux pôles (producteurs d’information et consommateurs d’information) mais plusieurs pôles interdépendants, plusieurs producteurs d’informations, et un rôle croissant des intermédiaires. Pour illustrer cela, certaines études montrent que les organismes qui influencent le plus fortement l’agenda setting sont les médias sociaux, comme twitter.
Ainsi, le web permettrait la création de nouvelles relations. Par exemple, la ville de Bologne ainsi que d’autres villes européennes, ont eu le projet européen de réaliser une smart city, c’est-à-dire une ville développant des projets technologiques. Le projet prévoyait d’avoir une plateforme commune au sein de laquelle les développeurs auraient interagi à propos de l’Open Data afin de faciliter le quotidien des citoyens. Cette plateforme n’a pas abouti, cependant, en mobilisant les développeurs de la ville de Bologne, un nouveau type de capital social s’est créé parmi eux. Celui-ci a permis la rencontre avec des institutions publiques comme des écoles, ce qui a abouti au développement de projets relatifs à l’accès à l’information et l’usage des nouvelles technologies de communication. Ainsi, ce projet a favorisé la production d’un capital social permettant l’augmentation de la puissance des liens à l’intérieur de la communauté et favorisant le networking avec d’autres groupes.
Le passage de la notion de « gouvernement » à celle de « gouvernance »