Le 20 décembre dernier est à marquer d’une pierre grise dans le paysage médiatique consacré à l’Europe. En effet, cette date a vu à la fois la fermeture du site d’information Presseurop.eu et la diffusion du premier épisode de l’émission Génération Europe sur Public Sénat. Cette coïncidence est heureuse car à l’approche des élections européennes, la disparition de ce site porte un coup à la communication autour de ce thème. Hormis la multitude de blogs traitant du sujet européen, dont la profusion est aussi la faiblesse, l’actualité européenne n’est pas particulièrement à l’honneur sur la scène médiatique. Les émissions dédiées à l’Europe sont rares, la principale étant sûrement aujourd’hui Europe Hebdo, une émission hebdomadaire coprésentée par Ahmed Tazir et Nora Hamadi respectivement sur LCP et Public Sénat. Parallèlement, la démocratie européenne se voit menacée par des taux de participation aux élections européennes ne dépassant pas les 50%…
Or l’information des citoyens sur l’Union européenne, ses institutions et son fonctionnement, n’a sans doute jamais eu autant d’importance qu’aujourd’hui, la composition du futur Parlement européen étant pour les commentateurs spécialisés tels que Fabrice Pozzoli-Montenay (Secrétaire Général de l’Association des Journalistes Européens) “cruciale pour l’avenir de l’Union européenne”. Les journaux, de leur côté, se heurtent à deux obstacles majeurs dans leur réponse à ce besoin d’information : cette actualité est handicapée d’une part par la difficulté qu’ont les médias à la faire rentrer dans leurs rubriques traditionnelles, et d’autre part par un manque d’intérêt d’un certain nombre de journalistes pour la question européenne, ceux-ci estimant par ailleurs que le sujet n’intéresse pas les lecteurs non plus.
C’est dans ce contexte qu’intervient l’émission Génération Europe, une émission produite par EDENPRESS, diffusée sur Public Sénat et présentée par Sandra Freeman. Le concept est simple : 8 étudiants, 1 invité sur le plateau, un intervenant extérieur, et une multitude de débats.
Dans un format d’une trentaine de minutes, les étudiants, issus des quatre coins de l’Europe et de différentes filières, s’adonnent librement à un jeu d’échange sur les différentes thématiques que posent l’Europe, telles que la citoyenneté européenne, la jeunesse européenne ou encore les frontières de l’Europe. Une fois cet échange terminé, un court reportage auquel est associé un de ces étudiants est diffusé, permettant tant aux protagonistes de l’émission qu’aux téléspectateurs de prendre connaissance d’un certain nombre d’éléments de contexte (statistiques, opinion de responsables divers,…). A la suite de cet interlude informatif, un invité jouant un rôle majeur dans les élections européennes rejoint le plateau pour débattre de ces questions d’actualités. Il lui sera également posé une question, filmée préalablement, de la part d’un journaliste issu d’un média partenaire (Atlantico ou Technikart) hors plateau.
Le format et la convivialité dans laquelle se déroule le débat permettent de retenir l’attention du public et de balayer un certain nombre de sujets souvent flous dans l’esprit des citoyens. Car il s’agit bien ici de “balayer” les problématiques posées, il n’est pas question d’instaurer un débat poussé, emprunt des questions complexes que pourraient soulever de telles thématiques, mais bien de s’interroger sur des sujets accessibles de tous et compréhensibles par tous. Génération Europe est donc une émission qui se veut tout public et a pour but d’intéresser les citoyens français à l’Union européenne à l’aube des élections européennes. C’est en ce sens que ce concept paraît particulièrement efficace.
Cependant, cette efficacité est à nuancer pour plusieurs raisons. D’une part, le format court de l’émission, associé au grand nombre de personnes présentes sur le plateau, ne permet pas de développer une réelle réflexion sur l’Europe mais simplement de donner des clés de lecture, aucune réponse ne pourra donc être concrètement apportée aux problèmes posés et elle risque de laisser le téléspectateur sur sa faim. On peut donc craindre que les thèmes, n’étant que survolés, frustrent un public qui ne comprendra pas pleinement les enjeux ou les problématiques.
En outre, si l’initiative de l’émission doit être soulignée et saluée, Public Sénat souffre d’une audience moindre que la majeure partie des chaînes d’information concurrentes. L’émission ne touchera donc sans doute pas un public élargi, et le public touché sera a priori composé de personnes déjà intéressées par l’Europe et les débats qui y ont trait. L’impact de l’émission sur la participation aux élections européennes est donc à nuancer.
On ne peut pour conclure que se réjouir pour la démocratie européenne qu’un service public se soit saisi de la question européenne afin de répondre à l’importance des enjeux à venir, néanmoins on peut se demander si cet effort sera suffisant pour insuffler un vent de participation dans les urnes en mai prochain.
Quoi qu’il en soit, regarder #GénérationEurope, c’est assister à des débats éclairants pour l’avenir de l’Union Européenne grâce aux témoignages d’étudiants investis et de personnalités politiques diverses telles qu’Edouard Martin, Yannick Jadot ou encore Jean-Marie Le Pen. Alors rendez-vous sur Public Sénat pour regarder l’intégralité des épisodes de cette émission !
crédit photo: Théo Fatséas