Situé en périphérie de Strasbourg, le Parlement s’érige aux cotés du Conseil de l’Europe et de la Cour européenne des Droits de l’Homme. Le bâtiment n’est pas sans rappeler le Colisée romain, mais les joutes y sont politiques et continuent en dehors de l’hémicycle. Les visites s’organisent au rythme des groupes donnant l’impression d’un musée vivant. L’ouverture du Parlement au citoyen, après quelques démarches administratives et de sécurité, est bien organisée. La visite du bâtiment permet de se rendre compte de la machine parlementaire. L’hémicycle est entouré de salles où les traducteurs opèrent en direct pendant les séances. Quand on y pense, il y a 23 langues parlées au sein du Parlement, ce qui fait 23×22 (506) combinaisons possibles.
L’interprétation de toutes les institutions de l’Union coûte environ 1% du budget de l’UE, soit environ 2,3 euros par citoyen et par an. (1)
Sur la question Croate
La question qui animait l’hémicycle et la vingtaine de députés présents lors de notre visite, le 17 avril dernier, concernait l’entrée de la Croatie au sein de l’Union Européenne. Les députés en séance plénière, ayant un temps de parole limitée, le consacrent à une annonce courte défendant leur position sur le sujet.
Deux camps, qui répondent à des critères géographiques et partisans, se sont formés sur sur cette question. Les eurodéputés des pays favorables à l’entrée de la Croatie dans l’UE (Pologne, Hongrie et Allemagne) défendent ses efforts, notamment en comparaison de la Roumanie et la Bulgarie. Le message envoyé à cette zone territoriale de l’Europe dynamiserait les pays frontaliers. (2)
Le camp opposé à l’entrée de Zagreb au sein de l’Union Européenne (dont la France fait partie) souligne les problèmes de corruption, de garantie des droits fondamentaux, l’acceptation des verdicts du Tribunal pénal pour l’ex-Yougoslavie, les dépenses engendrées par ce nouvel arrivant et un nom est cité «Ivo Sanader». (3)
Ivo Sanader était président du gouvernement Croate, accusé de corruption et de détournement de fond (notre Cahuzac made in Zagreb), son immunité présidentielle a été levée afin qu’il soit jugé. Il quitte la Croatie, pour finalement y être extradé en 2011.
L’argument de la crise interne à l’Europe est sans doute le plus convaincant. Car derrière l’arrivée de la Croatie, c’est une vision de l’Union européenne qui se dessine. Une Union toujours plus grande, à l’heure du regain de souveraineté nationale même chez les pays fondateurs avec la création d’un parti anti-européen en Allemagne, l’Union doit-elle grandir davantage ?
Le temps accordé aux députés ne leur permet pas d’user de rhétorique ou de construire un argumentaire. Mais leur «teaser» de discours permet de résumer la carte politique sur la question Croate.
Vous avez vu Dani ?
L’entretien avec Daniel Cohn-Bendit, a permis d’avoir une opinion française (ou franco-germanique) d’un acteur important de la politique européenne. Pour autant, les questions les plus nombreuses à être soulevées par les étudiants de notre master étaient souvent franco-françaises : Cahuzac, le patrimoine des élus, la communication de Hollande et l’arrêt de Cohn-Bendit en politique.
L’Union européenne a sans doute des efforts à faire pour occuper le «top of mind» des jeunes esprits français. La question de l’avenir de l’Europe est tout de même évoquée. C’est une position fédéraliste de l’Europe que défend Daniel Cohn-Bendit. Devant le constat d’une Europe inefficace dans son état actuel et face aux enjeux de la mondialisation et des forces politiques internationales il décrit comme obsolètes les Etats-nations. Les États-Unis d’Europe de « Dany le rouge » sont décrits dans son manifeste Debout pour l’Europe. La question du lobbying est soulevée et sur ce sujet il prône la transparence. Les lobbyistes représentent une source d’information nécessaire à la formation de l’opinion et des positions des députés ; ils sont censés leur donner une grille d’analyse critique, certes, en fonction des intérêts qu’ils défendent. La distinction entre lobbying et trafic d’influence est faite, et le meilleur barrage à la corruption demeure la transparence. Mais pour l’heure certaines affaires au sein du Parlement européen nous montrent que la corruption n’est pas le monopole de la Croatie …
Les Verts et leur communication
Un entretien avec l’assistante de Daniel Cohn-Bendit et l’un des responsables de la communication du Parti vert européen, dont Europe-Ecologie-Les-Verts (EELV) fait partie, permet d’être initié aux problématiques notamment électoralistes du parti. L’objectif en terme de communication est double. Faire adhérer aux idées défendues par les Verts, et faire augmenter la participation aux élections européennes. Une des problématiques liées à ce parti est en effet liée au faible taux de participation qui assure aux Verts de bons résultats aux élections européennes, mais que l’on ne retrouve pas lors élections nationales. Les réseaux sociaux, le site internet et la communication interne du parti des Vert sont des instruments utiles dans la perspective de fédérer des partis nationaux auxquels il faut donner des lignes directrices. Il en va du poids politique des Verts au Parlement européen. Trop divisé, sa force politique en sera altérée.
La clé est de réunir différents partis nationaux des Verts en fonction de leurs enjeux nationaux respectifs et différents électeurs ayant une connaissance plus ou moins étendue sur l’Europe.
Enfin, pour conclure cette journée, il est instructif de se rendre au coeur d’un des lieux de la mécanique européenne. Professionnellement, entrer au sein du Parlement en dehors d’une appartenance partisane et d’un parcours militant semble être un parcours semé d’embûches. Mais c’est sans doute rassurant de constater que l’Europe est gérée par des administrateurs compétents.
Un chaleureux remerciement à Ariane de Vrieze, Susanne Merkle et Dominique Renou pour avoir animé et organisé cette journée ensoleillée.