Le Président de la République a tenu le mardi 13 novembre la première conférence de presse de son quinquennat. Il est temps après six mois de reprendre en main la communication présidentielle. Les débuts du nouveau pouvoir ont parfois été difficiles. L’ombre de son prédécesseur n’est jamais loin : certains médias parlent du problème de la méthode Hollande. Autrement dit, le mode de gouvernance et de communication de François Hollande correspond-il aux attentes de la société française post-Sarkozy ?
2h30. C’est le temps que François Hollande a pris pour expliquer, pour tenter d’imposer son cap, pour donner sa vision de la situation de la France. Après une longue succession d’événements – Unes de journaux parlant d’amateurisme au sommet de l’Etat, remise du rapport Gallois, annonce du pacte de compétitivité de Jean-Marc Ayrault – le Président Hollande a conclut cette séquence en répondant aux journalistes depuis le Palais de l’Elysée. C’est un exercice qu’il connaît, qu’il maitrise. Ancien Premier secrétaire du Parti Socialiste, il a souvent dû se prêter au jeu des questions – réponses avec la presse et il en comprend les risques.
Et l’enjeu dans la communication de François Hollande, ne porte pas tant sur les annonces que sur les mots choisis. Notons qu’il y a eu peu d’annonces pendant cette conférence. Les décisions avaient été annoncées auparavant par la Premier Ministre. François Hollande se positionne comme un Président « normal » pour la cinquième République. Il est celui qui trace le chemin, qui donne ses arbitrages. Et son Gouvernement applique et met en action sa politique. Nul ne prétend que le Président n’intervient pas dans l’action gouvernementale. Mais ce rééquilibrage des pouvoirs au sommet de l’Etat est peut être l’élément qui rend la communication présidentielle parfois inaudible. Comment en effet paraître actif et en première ligne sans être celui qui annonce les actions gouvernementales ? C´est toute la difficulté de la méthode Hollande.
La société française a été habituée à cinq ans de Sarkozysme où les décisions étaient prises et annoncées par l’Elysée. En effet, chacun se souvient de la conférence de presse du 8 janvier 2008 où le Président de l’époque a annoncé devant la Ministre de la Culture la fin de la publicité après 20h sur les chaînes de la télévision publique. Certains médias diront que Christine Albanel n’était pas au courant de cette nouvelle mesure.
Ce mode de gouvernance a continué pendant la durée du quinquennat. Nicolas Sarkozy se plaçait en première ligne dans les médias. On évoquait alors un « hyperprésident« . Pendant la conférence de presse de 2008, Laurent Joffrin, alors rédacteur en chef de Libération, parle d’une « occupation continue de la scène médiatique ». Les médias – et par conséquent les Français – ont été habitués à avoir un contenu nouveau assez régulièrement. La Présidence Sarkozy s’appuyait sur un mode de communication sensationnel jouant sur l’effet d’annonce.
Sur ce point, le Président Hollande tente un nouveau mode de gouvernance et donc de communication. La discussion et la concertation sur un certain nombre de sujets (négociation sociale, conférence environnementale, réforme des institutions, etc.) voulue par l’Elysée rendent de facto la communication moins sensationnelle sur le plan médiatique. L´opposition parle cette fois-ci d’« hypoprésident ».
La droite mais aussi les médias, à l´image de cette parodie des Guignols, évoquent un vide depuis le départ de Nicolas Sarkozy. On peut sûrement parler d’un vide d’annonces immédiates. Mais c’est justement la méthode du nouveau pouvoir : prendre le temps de discuter et de se concerter. Par exemple, la conférence sociale doit amener à un débat entre partenaires sociaux et patronats. Dans son discours, François Hollande parle de « développer une vraie culture de la négociation sociale ». Les décisions ne sont donc pas prises immédiatement mais sur une période plus longue.
Clairement, la communication de Francois Hollande diffère de celle antérieurement pratiquée par Nicolas Sarkozy. Le premier est le Président en exercice, il doit être en mesure d´apposer sa marque et d´imposer sa stratégie. Son leadership et son charisme lui permettront d’atteindre son objectif. Un storytelling doit par ailleurs se mettre en place. L’objectif de cette conférence de presse est aussi de commencer une histoire. Celle d´un Président responsable de ses choix et capable de décider tout en prenant le temps d´écouter. François Hollande veut une stratégie de gouvernance et de communication sur le long terme. Mais on peut penser que sa stratégie ne pourra avoir un impact fort que lorsque les premiers signes du redressement se feront sentir. Alors la méthode Hollande aura montré que dans une société de l´instant elle fonctionne ou pas…