En septembre 2012 va débuter l’année franco-allemande qui fêtera le cinquantième anniversaire du Traité de l’Élysée et de l’amitié entre la France et l’Allemagne. Mais alors que la France vient d’élire un nouveau Président et une nouvelle majorité parlementaire, la cohabitation entre la gauche française et les conservateurs allemands n’est pas stabilisée.
Le 13 juin dernier, le premier ministre français affirmait que malgré «un certain nombre de points de désaccords» la France et l’Allemagne étaient «en train de se rapprocher sur les initiatives de croissance». Le message est clair, les divergences de point de vue ne remettent pas en cause les bons rapports entre Paris et Berlin.
Le lendemain, pourtant, le ton monte, Angela Merkel regrette un «manque de confiance entre les acteurs» européens. Pour elle «c’est n’importe quoi» d’opposer la croissance à la rigueur budgétaire. La chancelière accentue même en affirmant que l’Allemagne «ne se laissera pas convaincre par des solutions rapides comme les euros-obligations». Elle va même s’emporter et parler de « médiocrité » à l’égard de la position défendue par l’exécutif français.
Le Premier Ministre Jean-Marc Ayrault a réprimé ces propos en dénonçant «des formules simplistes». «Il faut prendre les choses avec sérieux et courage» a-t-il déclaré avant d’apaiser la situation le lendemain. «Il faut que l’Allemagne et la France, main dans la main, trouvent les 28 et 29 juin [au sommet européen de Bruxelles] une solution pour sortir l’Europe de la crise». Il a ensuite réaffirmé l’importance d’un travail commun entre la France et l’Allemagne.
Ce haussement de voix, très applaudi, de la part de la chancelière fait également suite à la réception des trois leaders du parti d’opposition Allemand du SPD [allié du Parti Socialiste français] la veille par François Hollande et par Jean-Marc Ayrault. Cette rencontre reflète différentes facettes. Recevoir les membres de l’opposition avant la chancelière est à la fois une certaine vengeance de François Hollande à l’égard d’Angela Merkel qui avait refusé de le recevoir pendant la campagne. C’est également une manière à la fois pour le Président français et pour la troïka du SPD de se placer en position de force face à la coalition au pouvoir outre-Rhin. Réciproquement le premier pour apparaître comme fort avant le second tour des législatives françaises et se placer en position de force lors du sommet du 28 et 29 juin à Bruxelles. Alors que pour le SPD c’est en prévision des élections législatives allemandes du printemps 2013.
Mais c’est en réalité une triangulaire où la chancelière n’est pas laissée pour compte. Du fait de la nécessité d’obtenir l’approbation des deux tiers du Parlement allemand pour faire accepter les traités, des discussions ont également lieu entre la CDU [parti conservateur de la chancelière] et le SPD pour la signature du traité budgétaire. Un accord aurait même déjà été trouvé et le SPD ne s’opposerait pas à ce traité. Un traité qui exclu pourtant les euros-obligations cher à l’exécutif français.
Depuis presque cinquante ans l’entente entre l’Allemagne et la France est le centre d’impulsion de l’Europe. Il en va de l’intérêt des deux pays de s’entendre et d’avancer côte à côte. Ce n’est pas la première fois que Paris et Berlin se retrouvent en cohabitation et cela a parfois très bien fonctionné comme entre François Mitterrand et Helmut Kohl. Ce n’est également pas la première fois qu’il est nécessaire de s’accorder pour réellement travailler ensemble. La question à se poser est donc plus de savoir quand l’harmonie va être retrouvée dans un contexte de crise où les décisions doivent être prises.
Mickaël Dieppois, étudiant erasmus à Berlin