En 2022, Emmanuel Macron a annoncé son soutien à la relance de l’industrie nucléaire, notamment par la construction de nouveaux réacteurs. La ville de Gravelines, dans les Hauts-de-France, a ainsi été sélectionnée pour accueillir deux nouveaux réacteurs nucléaires dans le cadre du projet EPR2 (Evolutionary Power Reactor 2). Conformément à la législation, EDF/RTE, les maîtres d’ouvrage, ont sollicité la CNDP pour organiser un débat public sur ce projet d’envergure. Mais comment organiser un débat public efficace en mobilisant une population diverse et parfois fataliste ? De notre visite enrichissante à Gravelines, aux rencontres inspirantes avec les acteurs locaux et les équipes du débat de la CNDP, plongez dans les coulisses d’un mois de travail, afin de faire de cette concertation démocratique, un projet réussi.
Un projet tutoré avec la CNDP, au cœur de la démocratie participative
C’est dans ce contexte de relance nucléaire, que notre projet tutoré avec la CNDP et ses équipes en charge du débat public de Gravelines a vu le jour. La Commission nationale du débat public (CNDP), autorité administrative indépendante depuis 1995, joue un rôle essentiel en garantissant la transparence et l’implication du public dans les décisions liées à l’environnement. Avec une mission claire : assurer que les voix des citoyens soient entendues et considérées, même si les décideurs peuvent justifier de ne pas suivre leurs avis, la CNDP promeut depuis 25 ans une culture de participation démocratique.
Dans ce cadre, notre mission initiale était d’informer les citoyens et d’encourager une large participation citoyenne aux débats, notamment par des jeux de rôles et d’autres initiatives participatives. Cependant, elle a évolué pour se concentrer sur l’élaboration d’une stratégie de communication, principalement numérique, efficace. Cette stratégie devrait maximiser la participation au débat public, qui se tiendra du 17 septembre 2024 au 17 janvier 2025.
Un déplacement à Gravelines enrichissant
Durant notre projet tutoré, et afin de mieux comprendre le contexte et les enjeux, les équipes du débat nous ont offert l’opportunité de nous déplacer à Gravelines, durant trois jours, afin de rencontrer les acteurs clés du projet. Nous avons découvert la ville de Gravelines et ses dynamiques locales, ce qui nous a permis d’adapter nos propositions pour un plan de communication plus efficace. Après notre arrivée, nous avons dîné avec l’équipe du débat, incluant Marc Papinutti, président de la CNDP, qui nous a éclairés sur l’indépendance de l’institution et du débat qui allait se tenir. Le 15 mai, nous avons visité les locaux de la CPDP pour ce débat et effectué une première présentation de notre plan de communication auprès de deux membres de la CNDP. Dans la même journée, nous avons eu l’honneur de rencontrer Jean Pinte, historien de la centrale nucléaire de Gravelines. Nous avons également rencontré Antoine Ménager, directeur du débat public pour l’EPR2, qui nous a partagé les enjeux du projet et de la concertation publique. Le 16 mai, nous avons rencontré Guillaume Schodet du CPIE Flandre Maritime qui nous a informés du travail des associations environnementales mais aussi des compromis qui pouvaient être fait. Ce séjour a été riche en échanges constructifs et a renforcé notre compréhension des dynamiques locales autour de ce projet majeur.
Élaboration d’une stratégie de communication adéquate et efficace
Afin de remplir les missions qui nous avaient été confiées par les équipes du débat de la CNDP, nous avons défini plusieurs objectifs. Un premier objectif de notoriété car nous devions faire en sorte que nos cibles soient informées de l’existence de ces débats. En effet, si nous voulions que la population se déplace pour prendre part aux débats, nous devions d’abord les informer de leur existence. Le deuxième objectif était un objectif d’image car toute notre stratégie devait se construire en conservant l’image de neutralité de la CNDP. Le troisième était un objectif informatif car il fallait les convaincre de l’intérêt de se déplacer en leur montrant que ces débats pourraient leur permettre d’en apprendre davantage sur le projet et de poser toutes les questions qu’ils souhaitent. Enfin, un objectif participatif puisqu’il fallait les convaincre de l’intérêt de se déplacer en leur montrant qu’en participant à ces débats ils pourraient proposer, échanger et donc prendre part aux décisions concernant l’impact qu’aurait le projet sur leur territoire.
En ce sens, nous avons conçu deux messages principaux destinés à orienter notre communication. Ces messages seront diffusés en deux temps. D’abord un message informatif : “Deux nouveaux réacteurs à Gravelines ? Ouvrons le débat !”, a été élaboré pour informer le public sur les débats en cours, soulignant l’importance de la transparence et de la participation citoyenne dans ce processus. Ensuite, un message incitatif, “Tout.e.s concerné.e.s par le nucléaire : apprenez, échangez, proposez”, a été développé afin d’encourager activement la participation du public aux débats en mettant en avant l’impact positif de leur engagement.
Ces messages étaient destinés à plusieurs cibles. En effet, afin de cibler efficacement notre audience, nous avions identifié différentes catégories de publics. Parmi nos cibles secondaires, nous comptions les associations susceptibles d’être intéressées par le projet et ses répercussions, ainsi que les retraités, principalement dans les Hauts-de-France et en Belgique. Nos cibles principales sont les habitants des Hauts-de-France âgés de 24 à 60 ans, notamment ceux éloignés de la centrale comme à Calais et Dunkerque, incluant des chômeurs, des parents et des futurs parents. Enfin, notre cœur de cible se compose des habitants proches de la centrale, en particulier ceux de Gravelines, âgés de 24 à 60 ans, qui sont les plus impactés par le projet mais souvent moins conscients des enjeux.
En parallèle, afin de diffuser nos messages, nous avons élaboré une stratégie multicanaux. Nous avions donc prévu la diffusion de publicités sur les chaines (radios et télévisions) locales ainsi que sur les réseaux sociaux sur lesquels les équipes du débat seront présentes : Facebook, Instagram, YouTube et LinkedIn, pour toucher un large public. Nous leur avons conseillé également de collaborer avec les cinémas de la région, les chaînes locales et les collectivités territoriales pour informer la population sur les débats. Cela pourra se faire par le biais de débats, podcasts, affiches, flyers…
Enfin, dans notre stratégie, nous avons inclus également des publications sur l’ensemble des plateformes numériques sur lesquelles les équipes du débat sont présentes. Nous avons recommandé que les contenus soient variés : photos, vidéos, stories, et FAQ (Foire Aux Questions), afin d’attirer et d’informer notre audience ; et que les slogans soient présents sur les différents contenus.
En outre, nous avons proposé à la CNDP d’engager des discussions avec des lycées des Hauts-de-France, dans le but de travailler en collaboration avec des classes de première HGGSP (Histoire-géographie, géopolitique, science politique) afin de faire participer les jeunes à ce débat. Pour favoriser l’engagement d’un public plus large, nous suggérons également la diffusion en direct des débats publics sur les réseaux sociaux, permettant ainsi à chacun de poser des questions et de participer activement, même à distance. De plus, nous avons proposé la création d’un dispositif interactif sur le marché de Gravelines, offrant aux citoyens la possibilité de partager leurs opinions via des bornes ou des tablettes.
Nous sommes honorés et enchantés d’avoir eu l’opportunité de nous impliquer activement dans l’élaboration de cette concertation démocratique. Ce déplacement à Gravelines a été bien plus qu’une simple mission professionnelle ; il a représenté une expérience enrichissante et formatrice pour chacun d’entre nous. Nous exprimons notre gratitude envers tous ceux qui ont rendu cela possible : les membres de l’équipe du débat, Nathalie Durand, Vanessa Haustein, Michel Champredon, Luc Martin, Paul Galli, mais aussi nos interlocuteurs locaux, ainsi que Stéphanie Wojcik, qui nous a accompagné tout au long de notre mission.