Le mercredi 29 novembre, Alexandre Borrell interrogeait Guillaume Meurice, humoriste et chroniqueur à France Inter, lors d’une rencontre à la médiathèque Elsa-Triolet et Aragon d’Argenteuil intitulée « L’actualité, juste pour rire ? Le traitement de l’information par l’humour ».
Quelques étudiants (les plus téméraires) de la salle 421 ont fait le déplacement pour l’occasion. Le natif de Chenôve, petite ville située dans la banlieue sud de Dijon a en effet le pouvoir de faire rire continuellement son public, même sur des sujets jugés parfois sensibles. Passé par le cours Florent de 2002 à 2005, il explique d’ailleurs qu’il a été le premier à « blaguer » sur l’antenne de France Inter après les attentats qui ont touché Paris en novembre 2015 – « c’est dans ma nature de rire de tout » souligne-t-il, même si, dans ces circonstances particulières, il a d’abord douté, avant de trouver un angle qui permettait une relative légèreté après l’horreur. L’humoriste rend une forme d’hommage à son père, vendeur de journaux qui passait ses journées à débattre avec sa clientèle et qui lui a insufflé le goût d’aller au bout d’un raisonnement. Il raconte que lorsqu’il était adolescent, il était déjà le premier à blaguer à tout propos et que cela pouvait parfois irriter.
Ses maîtres se situent plutôt du côté des sciences humaines, avec par exemple Albert Jacquard. Après le cours Florent, les événements s’enchaînent. Premier one man show en 2007, puis il intègre sur casting l’émission de Frédéric Lopez sur France Inter en 2012, et arrive finalement en 2014 dans l’émission Si tu écoutes, j’annule tout, rebaptisée Par Jupiter ! en septembre 2017. « J’ai été pris pour mon culot, parce que j’aime aller au contact des gens. Alex Vizorek voulait que je ramène deux à trois minutes de son par jour, sur le sujet de mon choix. J’ai ensuite architecturé l’ensemble avec du contexte et des blagues. »
Pour sa chronique, chaque matin il va à la rencontre de Français. Il choisit évidemment les lieux où il tend son micro, là où il trouvera « le bon client », mais précise que tout le monde est potentiellement un bon client. « Cette chronique ne peut pas être plus proche de ce que je suis. Rites, traditions, coutumes, je n’ai jamais pu me contenter d’entendre qu’on a toujours fait les choses comme ça, j’ai besoin de comprendre pourquoi. » Guillaume Meurice lui aussi sait faire surgir l’absurdité et le paradoxe.
Il explique ensuite, toujours avec une pointe d’humour, qu’il n’y a pas beaucoup d’humoristes vraiment de droite, « dans la plupart des cas, on rigole bien plus en se moquant des gens de droite que de gauche, l’humour de droite c’est peu courant… »
Il se situe à contre-pied du journalisme, « Je ne suis pas pressé par le temps, c’est une vraie force, mais surtout je n’ai pas à jouer le rôle qui leur est attribué. » Ainsi, lorsqu’il se rend dans ce qu’il appelle « le grand théâtre de l’Assemblée », il n’hésite pas à poser des questions décalées et se réjouit de voir ses interlocuteurs se dire « mais c’est pas dans le texte ça, il n’est pas censé dire ça ?! ». Maître de la joute verbale et particulièrement doué pour anticiper les réponses des uns et des autres, Guillaume Meurice prend un malin plaisir à déstabiliser et pousser ses interlocuteurs dans leurs derniers retranchements : « je fais de la résistance par rapport à l’univers médiatique traditionnel où l’on n’est pas autorisé à poser certaines questions. »
– Êtes-vous encore un “humoriste payé à faire des blagues” comme vous le revendiquez, ou l’éditorialiste a-t-il pris le dessus ?
– Je suis évidemment toujours un humoriste qui essaye de partager ses convictions, sa vision de tout ce “bordel”, en tentant de faire rire son prochain et sa prochaine. Le fait qu’on puisse me confondre avec un journaliste n’est pas réjouissant pour l’état du journalisme aujourd’hui. Le fait que Christophe Barbier ait une carte de presse, non plus.
L’interview se poursuit et vient une question sur son avis sur la manière de s’informer, avec l’émergence des réseaux sociaux, de l’info en continu… « Les générations qui arrivent, c’est des gamins qui n’allument plus la télé, il est primordial de passer par les médias alternatifs », mais le plus important selon le chroniqueur
c’est de développer son esprit critique. Ce qui est sur Internet n’est pas forcément vrai et la méfiance face aux médias traditionnels est là, envers BFM par exemple et je la remarque. Mais après les gens vont sur Internet et pensent détenir la vérité alors qu’ils viennent de lire un article sur FDeSouche ou je ne sais quel site du genre conspiration.com. Il faut donc se demander “qui est la personne qui raconte cela, est-ce qu’il y a un travail sérieux et fiable derrière tout ça ?”.
À l’occasion des échanges avec l’assistance, le sérieux alterne avec la légèreté, du glissement de Dieudonné de l’humour vers l’outrance au pouvoir présumé de l’humour, de l’accueil amusé que lui ont fait les jeunes candidats à la présidence des Républicains à la sélection qu’il doit opérer parmi les nombreuses sollicitations militantes ou commerciales dont il fait l’objet. L’humoriste entame aussi une conversation avec un membre du public qui débouche sur un débat sur le nombre de personnes qui se déclarent « vegan » à Argenteuil !
Lors de cette rencontre, le spectateur est passé par diverses émotions, avec l’évocation de sujets sensibles comme le terrorisme, la violence, les fake news pour ensuite se pencher sur des sujets bien plus légers. Guillaume Meurice semble répondre avec honnêteté à l’assistance, et confirmer ainsi qu’il est à l’aise à l’antenne parce qu’il n’y incarne pas un personnage.
Répartie, culot, impertinence… et surtout un humour imparable, c’est un condensé de tout cela qui permet à Charline Vanhoenacker aux côtés d’Alex Vizorek et Guillaume Meurice de continuer à donner le sourire chaque jour aux auditeurs de France Inter.
Guillaume Meurice est actuellement en tournée dans toute la France avec son one man show « Que demande le peuple ? » – Plus de détails ici : https://www.guillaumemeurice.fr/one-man-show/prochaines-dates.
À lire également, son premier livre – Guillaume Meurice, Cosme, Flammarion, paru le 7 mars 2018.
Hugo Rémond-Marques – https://twitter.com/Hugo_Remd
(promotion M1, 2017-2018)